Le Conseil d’État a eu l’occasion — par deux affaires présentées devant lui — de rappeler le droit essentiel des agents publics à pouvoir garder le silence lors d’une procédure disciplinaire et surtout de voir ce droit leur être notifié. De cette manière, le Conseil d’État vient entourer de plusieurs limites l’application de ce droit à garder le silence.

CE, sect., 19 déc. 2024, n° 490952

CE, sect., 19 déc. 2024, n° 490157

L’intégration du droit de se taire par le juge administratif

Lorsqu’il est question du droit de se taire, l’imaginaire collectif nous renvoi à notre référentiel américain cinématographique : « vous êtes en état d’arrestation, sachez que vous avez le droit de garder le silence… »   

Et bien ce n’était pas naturellement qu’était conçu le droit français. Il aura fallu l’intervention évolutive de la jurisprudence du Conseil constitutionnel pour faire émerger un véritable droit de se taire.

Voir en ce sens :

      • le droit du mis en cause de ne pas s’accuser (Cons. const., 2 mars 2004, n° 2004-492 DC, Loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité).
      • le droit pour le mis en cause de garder le silence (Cons. const., 30 juill. 2010, n° 2010-14/22 QPC
      • extension de ce droit du champ pénale et de la procédure pénale à l’ensemble du champ répressif – y compris à la répression administrative par des autorités administratives ou des juridictions administratives (const., 8 déc. 2023, n° 2023-1074QPC)
      • le droit de garder le silence s’applique à la répression disciplinaire, qu’il s’agisse de celle des officiers ministériels (const., 8 déc. 2023, n° 2023-1074 QPC) ; ou de celle des fonctionnaires et assimilés (Cons. const., 26 juin 2024, n° 2024-1097 QPC)

Cette série de décisions du Conseil constitutionnel aura nécessairement encouragée le Conseil d’Etat à trancher cette question du « droit de se taire » dans le cadre d’une procédure administrative.

La position du Conseil d’Etat était vivement attendue et dans deux décisions examinées lors d’une séance unique : un éclairage important a été vivement accueilli.

Tout d’abord, il consacre :

      • l’obligation d’informer un agent public du droit de se taire même dans le cadre d’une juridiction disciplinaire sous peine d’irrégularité de la décision disciplinaire.

La Haute juridiction précisera également les contours de mise en œuvre du droit de se taire.

L’application du droit de se taire dans une procédure disciplinaire

A travers ces deux affaires, le Conseil d’Etat n’a pas manqué de préciser les limites à la reconnaissance du droit de se taire dans le cadre d’une procédure disciplinaire.

Rappelons à ce stade qu’une décision prononçant une sanction disciplinaire alors que l’agent public n’a pas été informé de son droit de se taire est entachée d’une irrégularité de nature à emporter son annulation devant le Juge administratif.

Néanmoins, le Conseil d’Etat pose quelques limites :

      • La décision prononçant une sanction disciplinaire ne peut être annulée pour non-information du droit au silence que si l’audition sans cette information a eu lieu après l’engagement de la procédure disciplinaire et si la sanction se fonde de manière déterminante sur les éléments livrés lors de cette audition ;
      • la personne poursuivie doit être avisée qu’elle dispose du droit de se taire tant lors de son audition au cours de l’instruction que lors de sa comparution devant la juridiction disciplinaire. En cas d’appel, la personne doit à nouveau recevoir cette information ;
      • le droit de se taire ne s’applique ni aux échanges ordinaires avec les agents dans le cadre de l’exercice du pouvoir hiérarchique, ni aux enquêtes et inspections diligentées par l’autorité hiérarchique et par les services d’inspection ou de contrôle.

Conclusion

La procédure disciplinaire est une étape importante dans la procédure engagée à l’encontre d’un agent public. Il est important d’être accompagnée dès cette étape.

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