Le 6 octobre 2023, le Conseil d’État a rendu un avis concernant l’engagement de la responsabilité de l’État pour les traitements subis par les harkis dans les structures d’accueil dédiées à leur retour en France.

CE, avis, 6 octobre 2023, M. R…, n° 475115

Précision sur le champ d’application de la loi portant reconnaissance de la Nation envers les harkis

La loi n° 2022-229 du 23 février 2022 a instauré un régime forfaitaire de réparation des préjudices résultant de l’indignité des conditions d’accueil et de vie des harkis, leurs conjoints et leurs enfants.

Ainsi en dispose l’article 3 du texte précité :

« Les personnes mentionnées à l’article 1er, leurs conjoints et leurs enfants qui ont séjourné, entre le 20 mars 1962 et le 31 décembre 1975, dans l’une des structures destinées à les accueillir et dont la liste est fixée par décret peuvent obtenir réparation des préjudices résultant de l’indignité de leurs conditions d’accueil et de vie dans ces structures.

La réparation prend la forme d’une somme forfaitaire tenant compte de la durée du séjour dans ces structures, versée dans des conditions et selon un barème fixés par décret. Son montant est réputé couvrir l’ensemble des préjudices de toute nature subis en raison de ce séjour. En sont déduites, le cas échéant, les sommes déjà perçues en réparation des mêmes chefs de préjudice. »

L’absence de cumul du régime de responsabilité de droit commun et du régime spécifique prévu par la loi du 23 février 2022

Dans une décision du Conseil d’Etat du 6 octobre 2023 (CE, avis, 6 octobre 2023, M. R…, n° 475115), la Haute juridiction a précisé, une nouvelle fois, le champ d’application de la loi du 23 février 2022.

Le Conseil d’Etat précise donc :

  • Ne peut être cumulées la responsabilité de droit commun de l’État et la responsabilité reconnue par la présente loi au titre de mêmes dommages. C’est le régime particulier qui doit s’appliquer en vertu de l’adage specialia generalibus derogant.
  • N’est pas applicable la présente loi aux litiges en cours devant les juridictions administratives à la date d’entrée en vigueur de cette loi, soit le 26 février 2022, en raison de l’absence de dispositions transitoires.

Par conséquent, les recours engagés antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 23 février 2022 sont régis par le régime de responsabilité de droit commun.

Il pourra être rappelé que le Conseil d’État s’était déjà positionné quant à l’indemnisation des victimes des structures d’accueil des harkis. En effet, dans un arrêt du 3 octobre 2018 (Conseil d’État, 10ème – 9ème chambres réunies, 03/10/2018, 410611, Publié au recueil Lebon), la haute juridiction a condamné l’État à indemniser un fils d’harki sur le fondement de la responsabilisé pour faute à hauteur de 15 000€.